Si la passion du jeu entraîne les joueuses et joueurs dans des aventures formidables et extraordinaires, dans des mondes où il n’y a de limites que celles imposées par les concepteurs de jeux et l’imagination fertile des Ludophiles autour d’une même table, elle peut également s’avérer mauvaise conseillère lorsque vient le temps de constituer sa ludothèque. Dans cette chronique, vous trouverez quelques trucs et astuces pour débuter une ludothèque, pour en prendre soin en la nourrissant régulièrement et finalement pour savoir quand vient le temps de faire du mouvement… la partie difficile, se départir de certains jeux (et surtout comment s’y prendre).
Qu’est-ce qu’une bonne ludothèque?
D’entrée de jeu, il n’existe pas de bonnes ou de mauvaises ludothèques… mais il existe de bons et de mauvais propriétaires de collection de jeux. Si un jeu a le mérite d’exister, c’est qu’au moins une personne a penser au concept et une autre personne a cru pertinent de l’éditer. Tous les goûts sont dans la nature, dit-on. Ainsi, on ne peut juger la ludothèque d’autrui, mais on peut offrir une appréciation personnelle… Lorsqu’on se lance dans l’aventure de la collection de jeux de société, on doit d’abord identifier l’objectif de notre ludothèque… et le prix que nous sommes prêt à y consacrer!
Il existe plusieurs types de joueurs auxquels correspondront naturellement des types de ludothèques. Qu’on appartienne davantage à un type qu’à un autre n’est pas un prestige, c’est une question de goûts et d’intérêts. Ainsi, on a le passionné de jeux, adepte un peu fou des jeux à longs déploiements, le spécialistes des grands classiques, la grande amatrice des jeux de hasard et celle qui ne peut que tout calculer les probabilités avant d’effectuer un mouvement. Il y a les débutants qui s’initient lentement au monde du jeu et les vétérans qui sont toujours dans de la nouveauté. Il y a les joueurs occasionnels pour qui le jeu est un prétexte à la socialisation alors que d’autres jouent pour le plaisir de jouer jusqu’au bout! Dans un cas comme dans l’autre, la ludothèque devrait refléter les intérêts et possiblement évoluer comme le joueur évolue lui-même. Ceci étant dit, comment débuter sa ludothèque?
Débuter une ludothèque
Pour être en mesure de définir le type de joueur que nous sommes et les diverses mécaniques de jeux (la mécanique d’un jeu se définit comme le processus par lequel le jeu se constitue, se développe et se termine; cliquer ici pour avoir une idée des diverses mécaniques possibles: https://gusandco.net/2011/11/11/les-mecaniques-de-jeux/) qui nous correspondent davantage, il n’y a pas de secret… il faut tout simplement jouer, perdre et gagner!
J’entends déjà les plus perspicaces d’entre vous me demander… mais comment jouer si je n’ai pas de jeu? Ayez des amis qui ont un ou des jeux… c’est le principe du jeu de SOCIÉTÉ! Créer des liens. Le groupe Facebook Meeple Qc est également un bon moyens de créer des liens entre amateurs de jeux et de se créer des cercles de jeux. Annoncez vos couleurs : je suis de tel endroit, mes disponibilités sont surtout à tel période de la semaine, j’apprécie les jeux de tel type avec tant de personnes… Sur le groupe, il y a aussi le groupe Le bunker des jeux à Kat qui offre également plusieurs soirées de jeux par semaine (soirées pour joueurs aguerris, soirées découvertes, soirées approfondissement).
Un autre bon moyen pour découvrir sans se ruiner est d’emprunter ou de louer des jeux avant de les acheter. Plusieurs boutiques offrent plusieurs arrangements (de la location unitaire d’un jeu en passant par différents forfaits: mensuel, semestriel, semi-annuel et annuel). Souvent, la mise de fond pour la location peut servir d’acompte pour l’achat du jeu. En jouant à divers jeux, vous trouverez rapidement des mécaniques qui vous plaisent d’avantage que d’autres et vous serez en mesure de définir le type de joueur ou joueuse que vous êtes. Cela vous permettra de constituer lentement une ludothèque qui ne prendra pas la poussière et qui vous permettra plutôt d’accumuler de nombreux souvenirs mémorables que vous raconterez à vous enfants et vos petits-enfants!
Une fois que vous avez identifiés quelques jeux qui vous intéresse ou vous passionne carrément, renseignez-vous auprès de joueurs expérimentés pour savoir ce qui se fait dans la même dynamique. La page Facebook de Meeple Québec, par exemple, offre support et aide précieux. Chroniques diversifiées: présentation de jeux et critiques constructives, mise à jour régulière sur les nouveautés à paraître, petit dictionnaire pour comprendre le langage propre à l’univers du jeu, questions et réponses sur tout ce qui concerne le jeu, accès non seulement à des administrateurs et modérateurs expérimentés, mais également à plus de 2500 fans de jeux qui sont abonnés à la page, etc. Vous ne resterez pas longtemps sans réponses, garantit!
Finalement, une astuce simple et heureuse pour le budget, commencez votre collection par des jeux usagés. Parcourez les ventes de garage, les friperies, créez-vous un compte de type kijiji ou fréquenter les blackmarket de votre région sur Facebook. Quand on débute, on est moins triste de tomber sur un jeu moins intéressant à 5$ qu’un jeu qu’on a « pledgé » sur Kickstarter pour 200$ et attendu 6 mois pour recevoir une déception par la poste!
Nourrir et prendre soin de sa ludothèque
Une fois la ludothèque débutée, et qu’on trouve une part de notre satisfaction personnelle dans des jeux qui nous plaisent, vient le temps de penser à la variété des jeux. Nos amis ne sont pas tous adeptes des même jeux que nous. La variété des jeux dans une collection permet d’élargir ses propres horizons… et son cercle social. QU’Est-ce qui entre en compte dans la variété des jeux? D’abord la mécanique, la durée, la simplicité ou la complexité des règlements et le nombre de joueurs qui peuvent y participer. Viennent ensuite les critères de re jouabilité, de diversification du même jeu par un placement initial différent ou par des extensions par exemple. Puis, les styles des joueurs invités, les préférences personnelles et l’âge.
De là, l’achat de jeux neufs qui ne devraient pas nous décevoir dans les boutiques (il y a des périodes qui offrent des rabais… ça peut être intéressant de se renseigner! Il y a les campagnes Kickstarter qui font de grandes promesses et, de manière générale, il y a un bon taux de satisfaction chez les amateurs… quand ces derniers sont patients!
Entretenir sa ludothèque
Une mise en garde s’impose ici. Il existe une forme d’illusion de la prise de valeur d’une collection de jeux. Comme si les jeux de société devenaient tous « collector » et allaient un jour valoir une fortune, simplement parce qu’ils sont vintage. Habituellement, un jeu acheté et ouvert perd déjà 20% de sa valeur. Un jeu très bien entretenu mais joué plusieurs fois peut facilement perdre jusqu’à 40% de sa valeur. Il faut penser un peu à la « rentabilité » du plaisir. Je m’explique. Je dépense 10$ pour un jeu qui dure 15 à 20 minutes et dont je vais jouer au moins 50 fois avant de me fatiguer et le laisser prendre la poussière sur la tablette… ou l’échanger, le vendre, le donner. J’aurais donc eu plus de 15 heures de plaisir pour 10$ d’investissement… mieux qu’un film au cinéma. À l’inverse, un jeu 80$ qui dure de deux à trois heures, que je ne sors qu’une fois par année quand le cousin machin et la belle-sœur machine viennent pour le week-end de la fête du travail et qui retourne sur la tablette jusqu’à l’an prochain… peut-être! …ça fait cher pour le ratio plaisir/prix. Il faut se connaître et connaître ses limites.
Pour permettre un plaisir accru et surtout une meilleure rentabilité d’une ludothèque, le soin apporté au rangement des boîtes de jeu, à leur accessoires et à l’endroit où ils sont entreposés (ou exposés selon les fans!) sont d’une importance capitale. Le même jeu, avec les mêmes accessoires et la même usure… mais dans une boîte d’apparence neuve aux coins bien fermes et sa égratignures se vendre plus cher que le même jeu dans une boîte ramollie par l’humidité, dont un des coins tiens par la peur et le ruban adhésif et sur laquelle il y a un beau coup de crayon feutre, gracieuseté de votre petite nièce artiste auto-proclamée! Rangement et entretien des boîtes de jeu et des accessoires sont primordiaux… suffisamment pour leur dédier un endroit propre, sec, accessible et adapté. Ils peuvent même servir d’élément très apprécié de décoration dans une maison! Certaines ludothèques privées sont dignes de salle d’exposition dans les plus beaux musées!
Quelques conseils en vrac:
Évitez d’empiler trop de boîtes les unes sur les autres car ça écrase celles du dessous;
Éviter les endroits humides ou poussiéreux;
Éviter le plus possible la fumée de cigarette qui s’imprègne bien dans le carton ou les endroits où pitou et minou passent une partie de la journée;
Éviter de manger et boire à la table de jeu (préconisez plutôt des courtes pauses ou de petites tables à côté de la grande table de jeu pour y déposer breuvages et collations… sans oublier un linge humide et un sec pour ne pas déposer de gras sur les accessoires de jeux);
Gardez une liste à jour du contenu (date d’acquisition, prix déboursé, lieu ou personne d’où provient le jeu, état dans lequel il est au moment de l’acquisition, toute modification ou dégradation de la condition du jeu avec la cause et la date);
Notez chaque utilisation de chaque jeu (par exemple dans un carnet: date, nombre de joueurs, durée, degré de satisfaction – des applications sur téléphones et tablettes existent aussi);
Tout cela permet de « calculer le degré de rentabilité du jeu ». Il est plus facile, quand vient le temps de faire de la place dans sa ludothèque de choisir quels jeux sortir pour vendre ou échanger… ou donner en cadeau à quelqu’un avec qui on a joué et qui a particulièrement apprécié.
Dressez-vous une liste de critères propres à vous pour évaluer si un jeu a sa place dans votre collection : un jeu qui n’est pas sorti de sa boîte après tant de temps, un jeu qui n’a plus de secret ou de rebondissement, un jeu qui n’est plus adapté à ma nouvelle condition de vie (avoir des enfants peut limiter certains types de jeux pour une durée déterminée ou avoir un nouveau travail qui exige des déplacements plus réguliers par exemple), un jeu qui était agréable en famille parce qu’il permettait d’inclure les tout-petits… rendus maintenant adolescents…
Pour terminer, constituer une ludothèque est un investissement, de temps, d’argent, d’énergie, de soi-même, de ses passions et de ses capacités.
Le jeu permet des rencontres agréables dans un climat de détente, de franche camaraderie et crée des souvenirs mémorables qui se racontent souvent pendant des années. Les fameux « Te souviens-tu de… » Tout cela est un investissement… et il y a retour sur l’investissement: découvertes culturelles, artistiques et sociales, création de souvenirs heureux qu’on emporte avec soi les jours de grisailles et qui nous tiennent debout, développement et dépassement de soi et donc de son bonheur, lien d’amitiés qui se tissent et qui durent pour la vie, etc. Et ça, ça n’a pas de prix!
Par: Francis Gadoury