À la fin du 15e siècle, plusieurs cités se partagent le pouvoir de l’Italie avec les États pontificaux de Rome. Chaque cité souhaite obtenir la suprématie politique et commerciale de tout le territoire. Incarnant l’une des 5 grandes familles de cette époque (les Aragon, les Sforza, les Médicis, les Doges de Venise ou bien les Borgia), vous devrez prouver que vous maîtrisez la Virtù, c’est-à-dire, l’art de gouverner, concept né de Nicolas Machiavel lors de la Renaissance.
Virtù
Auteur: Pascal Ribrault;
Illustrateurs: Roma Gewska, Sveta Pikul, Alena Stepanova et Fabrice Weiss;
Éditeur: Super Meeple;
Distributeur: ÎLO;
Nombre de joueurs: 2 à 5 joueurs;
Durée: 30 minutes par joueur;
À partir de: 14 ans +;
Thématiques : Renaissance, politique et guerre;
Mécaniques : Jeu de wheelbuilding et de contrôle de territoire.
C’est quoi le but de Virtù?
Le but du jeu est d’être le joueur ayant le plus de points de prestige à la fin de la partie. Ce sera principalement le contrôle des villes et le patronage qui permettra de récolter des points.
Comment on joue à Virtù?
Une partie sera jouée par une succession de manches (années), qui elles, sont divisées en 2 phases, soit le printemps et l’hiver. Durant le printemps, les joueurs vont, à chacun de leur tour, faire une action en déplaçant leur marqueur dans leur palais. Chaque case du palais permet une action. Les joueurs peuvent remplacer ces actions avec des cartes personnages contenant elles aussi des actions, et très souvent, un meilleur choix de ressources. Il y a 6 actions possibles :
–Gouverner : Rafraîchir des tuiles du Domaine pour leur permettre de fournir leurs ressources à nouveau;
–Patronner : Progresser sur la piste de Patronage. Cela permet de gagner des points et des bonus;
–Commercer : Collecter des Florins (monnaie du jeu);
–Annexer : Prendre le contrôle d’une Cité neutre par la diplomatie;
–Intriguer : Placer, déplacer ou retirer un agent. Les agents permettent de faciliter la conquête de Cité ou de nuire les autres joueurs;
–Guerroyer : Déplacer des troupes vers des Cités pour tenter d’en prendre le contrôle après un siège.
Quand chacun des joueurs aura fait son action, il y aura la résolution des sièges s’il y a lieu. Ensuite, c’est la phase d’hiver. Les joueurs doivent alors payer leurs troupes puis, s’ils le désirent, réorganiser leur palais, acheter des cartes/tuiles, recruter des troupes et/ou conclure une alliance. Les années vont s’enchaîner ainsi de suite.
OK, et la partie de Virtù se termine quand?
La partie va se terminer quand l’une des 3 conditions de fin de partie est déclenchée (toute les Cités neutres ont été conquises, un joueur a atteint la fin de la piste de patronage ou de contrôle de cités). Les joueurs finissent donc l’année en cours et terminent avec le décompte des points. Le vainqueur est celui qui a le plus de points de prestige.
C’est tout?
Virtù va se jouer différemment à 2 joueurs. Les règles sont différentes en quelques points. On peut noter entre autres l’absence de patronage et la présence des pistes d’influences pour les 3 cités majeures (Rome, Florence et Venise). Les joueurs incarneront le Roi de Naples et le Roi de France. Une partie va durer 21 manches et le vainqueur sera celui avec le plus de points de prestige. Le joueur français peut également remporter la partie à tout moment s’il réussit à prendre le contrôle de la cité de Naples.
Ce que j’en pense de Virtù?
C’est un jeu où il faut mélanger stratégie militaire et diplomatie. Moi, qui aime bien l’histoire, j’étais bien intrigué par ce jeu lorsque j’ai examiné la boîte pour la première fois.
La qualité de production de matériel est au rendez-vous pour Virtù. Il y a beaucoup de tuiles et de jetons en carton épais et tous les pions sont en bois. Les cartes et les plateaux des joueurs (palais) sont en carton avec un beau fini. Bien que les palais auraient pu être conçus pour être plus épais, je crois bien qu’en faisant bien attention, ils ne devraient pas s’user rapidement. J’aime particulièrement les pions des troupes et des agents. Les agents, représentés par des masques, nous font penser aux masques que les gens portaient (et portent toujours) au carnaval de Venise. Et les pions de troupes sont bien sculptés en forme d’hallebardiers, un type de soldat très présent en Europe lors de la Renaissance.
Et du matériel, il y en a quand même une bonne quantité. Beaucoup de tuiles et de cartes différentes, plein de jetons et de pions. Le jeu ne vient pas avec un système de rangement et je crois que cela aurait bien été pratique. C’est certain qu’une poignée de sac fera l’affaire. Au moins, le matériel se range facilement dans la boîte et celle-ci est de taille relativement standard.
Côté visuel, les illustrateurs de Virtù ont fait un superbe travail. Les images sur les cartes personnages sont très belles. Les artistes ont repris certaines oeuvres déjà connues comme La Création d’Adam ou certains portraits de personnalités historiques et y ont apporté une touche un peu plus moderne. J’aime bien le graphisme et le style artistique utilisé dans ce jeu.
Une thématique bien représentée
La thématique des grandes familles italiennes luttant pour le pouvoir est très bien implantée dans le jeu. Chaque joueur incarne une Cité à laquelle une famille est associée. Un bon exemple est la famille des Médicis. En supportant financièrement des artistes, les Médicis a laissé sa marque dans l’histoire de l’Europe. Habitant principalement Florence, on a associé cette ville aux Médicis. Les Borgia sont aussi présents dans Virtù. C’est une dynastie familiale qui est relativement connue dans la culture populaire (la série télé Les Borgia ou les jeux vidéos d’Assassin’s Creed par exemple). Le jeu met bien en scène les conflits qu’ils pouvaient y avoir à l’époque de la Renaissance entre les grandes Cités italiennes.
Le mode à 2 joueurs explore une autre facette de cette période historique. Un des joueurs n’incarnera pas une des grandes familles italiennes, mais les rois de France. À la fin du 15e siècle, le roi Charles VIII affirmait son droit à la couronne de Naples et il a commandé une grande armée. Il réussit à prendre la ville après avoir soumis au passage Florence et Rome. Pour que le jeu ait plus de sens thématiquement, on a légèrement modifié les rôles des joueurs. Je trouve que ce changement est pertinent et qu’il imprègne davantage les joueurs à la réalité historique de la Renaissance. En plus, au début des 2 livres de règles, on a des petits résumés pour nous présenter le portrait de l’Italie à ce moment de l’Histoire.
Les règles de Virtù
Le livre des règles contient une vingtaine de pages (et une dizaine de plus pour le mode à 2 joueurs). Personnellement, cela ne m’intimide pas. Il y a beaucoup de jeux qui viennent avec de gros livres, mais qu’en soit le jeu n’est pas très compliqué et se prend facilement en main. Virtù est un jeu avec une certaine complexité et je ne le recommanderais pas à des joueurs débutants.
Le livret principal explique bien les règles de manière générale, mais certaines règles peuvent porter à confusion et vont demander plusieurs relectures pour bien en comprendre le fonctionnement. Je pense entre autres aux alliances que l’on peut conclure avec une Puissance majeure et à leur utilisation. À la base, ce n’est pas si compliqué, mais si on fait intervenir un agent, je vous garantis que vous allez retourner dans le livre de règles pour voir comment cela fonctionne.
Et les mécaniques de jeu?
La mécanique de wheelbuilding ou de rondelle est par contre un bon coup pour Virtù. Premièrement, chaque palais est légèrement différent dans la position des actions sur les salles. Deuxièmement, avec l’achat de cartes, on peut modifier notre palais et avoir un ordre d’action complètement différent. On peut même avoir plusieurs fois la même action dans notre palais. Avec les cartes dites “en amélioration”, cela nous offre plus de ressources réutilisables pour l’action de la salle choisie. Cette mécanique nous offre la possibilité de personnaliser nos choix d’action au cours de la partie. De plus, à chaque hiver, il est possible de réorganiser les cartes (dans une certaine limite et selon certains critères).
Une chose qui semble être un peu plus défaillante à mon goût est la conquête des villes. Pas que ce n’est pas bien réussi comme principe, mais d’y aller avec les actions guerroyer est plus ardu que l’annexion. Cette dernière ne demande que de dépenser des ressources “couronne” pour prendre contrôle les villes neutres voisines. Ces ressources peuvent être facilement réutilisables si on a bien planifié nos cartes personnages dans notre palais.
Pour guerroyer, il faut en premier lieu recruter les troupes. Ensuite, il faut les déplacer (et cela peut demander beaucoup de ressources de cavalerie selon le nombre de troupes et la distance à parcourir). Puis, il faut payer la solde de l’armée à chaque tour. Finalement, il faut aussi se prévoir potentiellement des bonus de guerre (qu’il faut souvent aussi payer). Et guerroyer présente aussi un risque : ce n’est pas parce que tu vas assiéger une ville que vas nécessairement en réussir la conquête. Pour l’annexion, tu as les couronnes nécessaires? Tu as le contrôle de la ville. Par contre, guerroyer peut permettre de prendre des villes aux autres joueurs.
Comment se passe une partie pour les joueurs?
C’est entre autres avec cette action (guerroyer) que l’on aura beaucoup d’interaction avec les joueurs. On va essayer de se voler les villes ou essayer d’en conquérir une plus rapidement. Un autre aspect qui favorise l’interaction est l’action Intriguer. Les agents que l’on place peuvent poser des embûches aux autres joueurs et retarder leurs plans. Les agents peuvent bloquer des actions s’ils sont dans des palais ou rendre une ville plus difficile à conquérir (ou plus facile pour le joueur propriétaire). C’est une mécanique intéressante, mais qui peut apporter son lot de frustrations.
Virtù va manquer un peu de fluidité entre les tours. Certains joueurs auront de courtes actions à faire, alors que d’autres seront un peu plus élaborées ou les joueurs prendront plus de temps à réfléchir. L’opportunité d’acheter des cartes et des tuiles à chaque tour peut casser le rythme de la partie. Ce sont des moments de réflexions supplémentaires qui s’ajoutent pour peser le pour et le contre de chaque cartes et tuiles présentes dans le marché (et il y a beaucoup de choix!).
Derniers commentaires pour Virtù
Virtù est un jeu assez riche en mécaniques de jeu et en stratégie. C’est un jeu qui aura son public. Puisque les batailles ne relèvent aucunement de la chance, c’est un jeu qui est ciblé pour les stratégistes. La rejouabilité est limitée par la mise en place assez statique. Elle existe par les différentes cités jouables et les différents agencement de notre rondelle que nous pouvons faire.
Bref, si vous aimez les jeux de guerre relevant de stratégie dans une thématique de Renaissance italienne, alors Virtù est un jeu pour vous!
On aime:
– Le look de la boîte et les illustrations qui représentent bien la thématique;
– Les règles du jeu bien expliquée dans son ensemble;
– Le matériel de bonne qualité et les pions en bois de formes intéressantes;
– L’ambiance compétitive présente lors des sièges;
– L’interaction très présente entre les joueurs au niveaux des sièges et du placement des agents;
– La thématique de la Renaissance italienne qui est très bien implantée dans le jeu;
– Les mécaniques de jeux qui fonctionnent bien ensemble et le wheelbuilding que je particulièrement intéressant;
– Le mode pour 2 joueurs qui reflète un autre aspect des conflits dans l’Italie dans le but d’être cohérent pour le nombre de joueurs.
On aime moins:
– Les multiples petits détails qui nous refont constamment relire les règles;
– La complexité des conquêtes des villes par siège par rapport à l’annexion;
– Le manque de fluidité entre les tours des joueurs.
On aurait aimé:
– Un système de rangement pour le matériel du jeu.
Il est à noter que si:
– Vous êtes une personne débutante dans les jeux de société, Virtù pourrait se montrer difficile à maîtriser;
– Vous n’aimez pas être embêté par les autres joueurs, alors il vaut mieux éviter ce jeu.
Merci à notre partenaire ÎLO de nous avoir offert
une copie du jeu Virtù pour cette chronique.
Nous vous invitons à découvrir d’autres jeux de ce distributeur
en lisant notre chronique sur le jeu Genesia