Aztec, avis et chronique de jeu

Partir à l’aventure et découvrir des trésors cachés avec ses amis! Quel rêve! Mais qu’en est-il lorsque vient le temps de se partager le butin? L’amitié a-t-elle un prix? Qui veut s’enrichir plus que les autres? Avec originalité, ce jeu conduit les joueurs non pas à la quête d’un trésor, mais bien au partage de celui-ci! Entre vérités et coups de bluff en passant par les ruses cachées ou les coups de traître, saurez-vous ressortir du temple avec plus de richesses que vos compagnons d’aventures… ou porterez-vous éternellement la malédiction du trésor d’Aztec?

Aztec
Auteur: Stéphane Beaume;
Illustrateur: Sabrina Tobal;
Éditeur: Matagot;
Distributeur: Îlo307;
Nombre de joueurs: 3 à 6 joueurs;
Durée: 30 minutes;
À partir de: 10+;
Thématiques: Trésors, temple aztèque, pierres précieuses, superstition;
Mécaniques: Bluff, pige de cartes, manches, collection, optimisation.

C’est quoi le but?

Pour gagner une partie de Aztec, les joueurs doivent cumuler le plus de joyaux possible et les combiner selon des objectifs communs ou propres à leur personnage afin de gagner le plus de points de victoire. Afin d’y arriver, des artefacts peuvent aider les joueurs à optimiser leurs combinaisons de joyaux, à se départir de joyaux maudits ou encore de mettre des entraves dans la progression de leurs adversaires.

Mise en place pour une partie à six joueurs

Comment on joue?

Avant de débuter une partie de Aztec, on place les joyaux et les pierres maudites au centre de l’aire de jeu, en prenant soin de déposer la pile des cartes Artefact devant les pierres maudites et les cartes Malédiction devant la réserve de joyaux correspondant à leur couleur. Ceci constitue le Temple. Les joueurs reçoivent chacun une fiche Personnage et le jeton correspondant, ainsi que cinq cartes joyaux, face cachée. On place une pierre maudite sur chacune des trois cartes Malédiction et deux pierres maudites sur chacun des plateaux des joueurs. Tout est maintenant prêt pour débuter la première manche.

Une manche se déroule en cinq étapes :
1- Récupérer des joyaux dans le temple;
2- Jouer son jeton personnage
3- Dévoiler les cartes joyaux et appliquer les conséquences;
4- Appliquer les malédictions;
5- Fin de la manche


Pour débuter la manche, (1) tous les joueurs consultent secrètement la première carte de leur pioche personnelle de joyaux et la posent face cachée devant eux en y déposant un certain nombre de joyaux aux couleurs de leur choix.

Quelques exemples de cartes joyaux.
Certaines permettent de pige deux, trois ou quatre joyaux.

Ensuite, (2) en même temps, les joueurs posent leur jeton personnage devant la fiche personnage d’un autre joueur à leur choix, soit sur la face verte – qui signifie que l’on croit le joueur -, soit sur la face rouge – qui illustre qu’on suppose un bluff de la part de ce joueur. Il est possible de retrouver plusieurs jetons devant un même joueur comme il se peut qu’un joueur n’ait aucun jeton devant lui.

Les jetons, réversibles vert-rouge, permettent de voter

À ce stade, en commençant par le premier joueur, (3) on révèle la carte joyaux et on applique les effets, selon que le joueur a annoncé la vérité ou tenté de bluffer :

Un joueur qui a dit la vérité ajoute à sa fiche personnage les joyaux présents sur sa carte. Si un ou plusieurs joueurs l’ont accusé de mentir, il remet à chacun une de ses pierres maudites. Si au moins deux adversaires l’ont accusé de bluffer alors il reçoit un artefact en prime. Finalement, les joueurs qui ont cru le joueur qui a dit la vérité peuvent aussi défausser une pierre maudite en la déposant dans la réserve commune.

Un joueur qui a bluffé sans se faire prendre ajoute à sa fiche personnage les joyaux présents sur sa carte et gagne un artefact. Si un ou plusieurs adversaires l’ont cru, ils reçoivent alors une pierre maudite de la réserve commune.

Un joueur qui a tenté de bluffer mais qui a été démasqué doit défausser les pierres qu’il a tenté de prendre et il place sur sa fiche personnelle les joyaux qu’il devait légitimement recevoir. De plus, il reçoit une pierre maudite de la part de chacun des joueurs qui ont devinés son bluff et les joueurs qui l’ont cru en reçoive une de la réserve. Si au moins deux joueurs l’ont accusé, ils reçoivent chacun un artéfact en récompense.

Quelques exemples de cartes artefact avec leur pouvoir.

Deux précisions s’imposent. D’abord, dans le cas où une personne n’a pas de pierre maudite en sa possession et qu’elle doive en remettre à un joueur, elle prend alors une pierre maudite de la réserve commune pour la donner à ce joueur. L’autre précision concerne la manière de gagner un artefact: le joueur pige les trois premières cartes de la pile, en sélectionne une et remet les deux autres sous la pile.

Après cette phase, (4) on applique les malédictions. Au centre de l’aire de jeu, des cartes Malédiction contienne une ou plusieurs pierre(s) maudite(s). Pour chacune des couleurs, le joueur ayant en sa possession le plus grand nombre de pierre correspondant doit récupérer toutes les pierres maudites présentes sur la carte Malédiction. S’il y a égalité en tête, personne ne prend ces pierres maudites et elles demeurent sur la carte pour la prochaine manche.

Les trois cartes Malédiction aux couleurs des joyaux: bleu, rouge et “jaune”.

Finalement, (5) arrive la fin de la manche. Les cartes joyaux qui ont été révélées sont défaussées, on ajoute une pierre maudite à chacune des cartes Malédiction et le joueur qui se trouve à la gauche du premier joueur de la manche qui s’achève devient le premier joueur de la manche qui débute.

C’est tout?

Bien que les règles de jeu ne soient pas des plus complexes, des cartes aide-mémoire sont disponibles pour chacun des six joueurs. Comme information, on y trouve un rappel des cinq étapes de chacun des tours de jeu ainsi que de la manière de procéder au décompte final. De l’autre côté de la même carte, on peut lire les conséquences suite à la pose des jetons personnages (vérité/bluff).

Les cartes aide-mémoire sont recto-verso

OK, et le jeu se termine quand?

Une partie de Aztec se déroule en cinq manches. À la fin de la dernière manche, on procède au décompte des points et on détermine le vainqueur.
– On marque deux points par trio de pierres précieuses aux couleurs différentes (rouge, jaune, bleu);
– On marque un point pour chaque duo aux couleurs de notre personnage;
– On marque les points de nos artefacts;
– On retranche les points de nos pierres maudites.
Le joueur ayant le plus de points remporte la partie. En cas d’égalité, le joueur ayant le moins de pierres maudites remporte les honneurs!

Voici à quoi ressemble l’aire de jeu lors d’une manche de Aztec!

Ce que j’en pense?

Débutons par le produit en lui-même. La boîte de jeu, qui est d’un vert émeraude, représente une petite troupe d’explorateurs-aventuriers dans une grande salle au trésor d’un Temple aztèque. Outre le nom du jeu, de son créateur et de l’illustratrice on y retrouve d’un seul coup d’œil la majorité des informations que l’on cherche: nombre de joueur, durée et public cible Si l’endos ne dit pas grand-chose sur la dynamique du jeu, il en appelle toutefois à sa mécanique principale: le bluff! Bref, l’essentiel des informations est présent sur la boîte, mais on aurait aimé un peu plus que l’essentiel.

En ce qui a trait à la qualité du matériel, je dirais que c’est inégal. La boîte a une taille appropriée au matériel; les cartes sont un peu minces pour une manipulation répétée, mais sont tout de même acceptables; les jetons joueurs sont faits de carton très épais et sont parfaits; les pierres précieuses remplissent leur fonction sans aucun souci; et les fiches joueurs sont clairement trop minces, ayant tendance à retrousser dans les coins et étant très peu pratiques pour y déposer nos butins.

Le livret de règles est très simple et tiens en une page recto-verso. C’est dire à quel point il n’est pas besoin de compliquer les choses pour avoir beaucoup de plaisir! Soulignons au passage une imprécision dans les règles: un artéfact demeure face cachée lorsqu’il est gagné. Il faut aller sur les forums pour y trouver la réponse officielle de l’éditeur. Heureusement, Matagot est un éditeur attentionné à sa clientèle.

On apprécie la quantité d’artéfact (42), leur diversité d’effet et le choix proposé entre trois lorsqu’on en gagne. On apprécie également qu’au nombre de ces artéfacts, seul un très petit nombre a des impacts négatifs sur les autres joueurs: sur les 42 cartes artefacts, il n’y en a que quatre qui sont « agressives »; deux permettent de détruire un artefact et deux autres obligent les adversaires à piocher immédiatement une pierre maudite. Il y en a encore deux qui ajoutent deux pierres maudites sur une carte malédiction, mais ce n’est pas une attaque directe. Si certains joueurs sont plus susceptibles (ou dans certaines parties avec des enfants) il est facile de retirer ces quatre cartes.

Sans que cela ne soit de réels points négatifs, soulignons que les couleurs de la boîte de jeu et des composantes, même les joyaux translucides, sont plutôt ternes et sans éclat. Ce qui va bien avec la thématique, comme si nous étions dans la pénombre d’une salle d’un temple mal éclairée. Toutefois, pour un jeu familial, j’aurais aimé des couleurs un peu plus chatoyantes à l’œil. D’autre part, on ne comprend toujours pas pourquoi la carte Malédiction qui correspond aux joyaux jaunes est… verte.

Finalement, bien que les personnes vivant avec une difficulté de distinction des couleurs pourraient ne pas être en mesure de jouer à Aztec, soulignons l’effort de placer des personnages aux traits issus de la diversité culturelle et sexuelle.

Venons-en à l’expérience du jeu lui-même. D’entrée de jeu, Aztec fonctionne vraiment bien. Il est facile à prendre en main, s’explique en quelques instants à peine et il ne requiert que très peu d’espace de jeu. Il se glisse facilement dans un petit sac de voyage ou dans la poche d’un sac à lunch.

La longueur des parties permet de le sortir à une pause dîner ou encore dans un petit creux d’horaire, avant un repas à la maison ou pendant une pluie passagère au camping. Il faut toutefois demeurer prudent car il comporte beaucoup de petits composants de jeux, dont 160 joyaux, faciles à échapper ou à disperser lorsqu’on accroche son plateau de joueur. Il est recommandé de jouer avec de petits contenants pour limiter ce risque, surtout quand de jeunes joueurs un peu moins habiles sont présents autour de l’aire de jeu. Quoi qu’il en soit, on aime manipuler les joyaux en trois dimensions.

En plus des 120 joyaux (40 de chacune des trois couleurs), on a 40 pierres maudites (noires).

Les fiches personnages provoquent également une légère asymétrie dans les objectifs à remplir pour inscrire des points. Avec les cartes artéfacts, ces fiches sont d’excellents rappels sur la manière d’inscrire des points, même pour quelqu’un qui ne sait pas lire! L’iconographie est, de fait, très intuitive.

Habituellement, plus il y a de joueurs, plus le jeu est agréable car il donne davantage de possibilités. La durée de jeu n’augmente pas de manière suffisamment significative qu’on soit trois ou six joueurs. On parle de peut-être cinq à sept minutes tout au plus pour des parties qui ne dépassent généralement pas la demi-heure… à moins que vous ne soyez dans un cinq-à-sept et que certains joueurs soient plus bavards sous l’effet d’un ou deux verres! Oui, vous avez bien lu! Ce jeu d’apparence familial est un jeu parfait pour ce type d’événement car il crée la discussion, il engage à déceler chez les autres les signes annonciateurs de bluff ou de sincérité et lorsque les convives sont moindrement dégourdis, des éclats de rire nombreux et répétés peuvent survenir. Je suis convaincu que si le même jeu était édité avec un artwork plus mature et une thématique plus sentie, Aztec pourrait rejoindre un public d’adultes amateur de jeu d’ambiance.

Après quelques parties, on constate que le système de conséquences n’est pas aussi simple à mémoriser qu’il n’y paraît. Du moins, pas pour tout le monde. En effet, même après plusieurs parties, certains joueurs doivent toujours recourir à la carte aide-de-jeu afin de se rappeler la provenance des pierres maudites en telle ou telle circonstance. Vient-elle de la réserve commune ou de la carte personnage des joueurs?  C’est le cas notamment des plus jeunes ou de personnes ayant des défis avec les subtilités ou les règles multiples. Si je questionnais le public cible (10 ans et plus) lors de la découverte du jeu, ce genre de détails et la question de l’optimisation des joyaux en lien avec les cartes artefacts qui demeurent secrètes jusqu’en fin de partie me confirment que la cible est bien choisie. À moins que vous ayez de 8 ans et plus qui ont déjà une certaine expérience de jeux… alors là, attendez-vous à toutes les surprises!

D’un point de vue stratégique… car il y a tout de même un peu de stratégie dans Aztec… le tout consiste évidemment à tenter de gagner un bon nombre d’artéfacts et surtout, de choisir ceux qui utilisent les mêmes couleurs que vous avez besoin sur votre fiche personnage. Certains de mes amis sont passés maître dans l’art de la combinaison des cartes pour inscrire des scores parfois surprenants. Il faut savoir bluffer au bon moment et la vérité est souvent bien payante… bien que ce ne sont pas toujours les joueurs les plus honnêtes qui gagnent!

Bref, si vous aimez les jeux rapides, faciles à prendre en main et portés par une ambiance conviviale, si vous cherchez davantage le prétexte ludique pour prendre du plaisir en famille ou entre amis et que la victoire n’est pas votre objectif ultime… alors Aztec est pour vous!

On aime:
– La simplicité des règles du jeu;
– La rejouabilité, surtout liée à la durée courte des parties;
– L’ambiance provoquée par les nombreuses interactions;
– Un jeu tout de même assez accessible;
– L’aspect un peu « passe-partout » qui permet de jouer souvent;
– L’iconographie intuitive;
– La mécanique qui, sans grande originalité, apporte une réelle fluidité aux parties;
– Les cartes aide-mémoire qui sont bien utiles lors de la phase bluff/vérité;
– L’effort de présenter des héros et héroïnes issus de la diversité;
– L’équilibre du jeu qui est surprenant pour un jeu d’ambiance et de vote.

On aime moins:
– Le look de la boîte qui ne dit pas grand-chose du jeu et les couleurs ternes des composantes;
– La qualité inégale du matériel;
– La thématique qui est très accessoire;
– Les personnes vivant avec une anomalie de la vision affectant la perception des couleurs (dyschromatopsie, daltonisme) pourraient avoir beaucoup de difficulté à jouer à Aztec.

Il est à noter que si vous êtes une personne qui n’apprécie pas les jeux dans lequel le hasard ou la tromperie constituent la mécanique principale, vos chances d’aimer Aztec sont plutôt faibles.

8/10

Merci à notre partenaire Îlot307 de nous avoir offert une copie du jeu pour cette chronique.

Si vous aimez les jeux ayant trait à la civilisation aztèque, vous aimeriez sans doute découvrir le jeu québécois Cóatl.

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